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5 août 2021

Le plastique, pas fantastique

En résumé

Soutenue par MAIF et son réseau militant, Anaëlle Marot s’est lancée dans un long périple pour alerter sur la pollution due au plastique. Descente de la Loire en kayak, remontée à vélo ! Une expédition rythmée chaque dimanche par une séance citoyenne de ramassage de déchets sur les bords du fleuve. 

Anaëlle Marot marche devant son kayak, sur la Loire.
Le Projet Azur d'Anaëlle Marot : de grands moments de solitude ponctués de nombreuses rencontres. Au 11 août, plus de 750 personnes avaient participé aux séances dominicales de ramassage de déchets.© Bernard Le Bars/MAIF

Quittant la Loire à Saumur, remontant le Thouet jusqu’à Missé, Anaëlle Marot fait étape en terre familiale. Plus qu’une famille, c’est un comité d’accueil qui l’attend. Élus locaux, militants associatifs, représentants de la MAIF, volontaires bénévoles : ils sont une trentaine en ce dimanche 8 août, tous volontaires pour une séance de ramassage de déchets aux abords du Thouet. Parmi eux, Alexandre Gonçalves, instituteur d’Anaëlle en CM 1. Les retrouvailles sont chaleureuses, il se tombent dans les bras. Alexandre fut l’un des premiers à ouvrir les yeux d’Anaëlle sur la question environnementale. Vingt ans après, il continue d’entraîner ses élèves dans des randonnées d’observation et de ramassage des déchets qui souillent le milieu naturel. « Cette activité a même été amplifiée par la pandémie de Covid. Pendant une bonne partie de l’année 2020, elles ont remplacé les cours d’éducation physique » affirme- t-il. Comme chaque dimanche depuis son départ du Mont-Gerbier-de-Jonc, Anaëlle a convié les associations locales de défense de l’environnement. Ce dimanche, c’est CleanForest qui a répondu présent et qui prête le matériel aux participants (gants, sac, longue pince).

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"Chaque minute, 20 tonnes de déchets arrivent en mer"

À 10h00, perchée sur un tabouret, Anaëlle délivre un rapide discours. « En descendant la Loire, j’ai suivi le trajet d’une bouteille en plastique que l’on aurait jetée sur la berge du fleuve, jusqu’à l’océan. Chaque minute en effet, 20 tonnes de déchets arrivent en mer. La plupart sont charriés par les rivières. Le nettoyage de berges que vous allez faire ce matin est donc hyper important ! ». Ainsi motivés, les participants s’égayent dans la nature. Edwige Ardrit, vice-présidente de la communauté de communes de Thouars, est sûre d’elle : « Ils ne trouveront rien, la commune est propre ! ». Et pourtant… Les glaneurs prennent leur mission au sérieux : avançant au pas, ils fouillent chaque buisson, chaque fossé. À midi, la collecte est terminée. Une large bâche est déployée au sol. Le tas grandit à mesure que les sacs sont vidés : 2 pneus, 22 bouteilles en plastique, 71 mégots, du grillage, des filets de pêche, 3 cartouches de chasse, des débris et ustensiles divers, une boîte en plastique, des volets roulants… 135 kg au total. « Cela peut paraître beaucoup mais c’est très peu en comparaison des 300 kg de déchets que nous ramassons à chaque sortie en milieu urbain» analyse Vincent Mirault, président de l’association Clean Forest. 

Privilégier les achats en vrac et les circuits courts

En vérité, le poids de déchets récoltés ne signifie pas grand-chose. « Il sert surtout à la communication. Mais un seul mégot pollue 500 litres d’eau alors qu’il ne pèse que 3 grammes » précise Anaëlle. Au presque terme de son périple en kayak, à Nantes, Anaëlle a donné une conférence TEDx. Un exercice oratoire difficile, qui lui a cependant permis de livrer les ressorts de son combat : refuser l’inacceptable, transformer l’indignation en action.  « Le plastique est capable de fixer les métaux lourds, les polluants, les virus, les perturbateurs endocriniens. En se dégradant dans l’océan, il se désagrège en particules de très petite taille que l’on retrouve dans l’estomac des poissons, des oiseaux marins, des tortues… C’est une menace sur la chaîne alimentaire et sur la fertilité de cette faune marine ». La jeune militante est convaincue qu’il faut accentuer nos efforts et réduire à néant notre consommation de plastiques à usage unique. En privilégiant les achats en vrac et en circuits courts, en buvant l’eau du robinet plutôt que l’eau en bouteille, en chassant tous les emballages superflus. La boutique du MAIF SOCIAL CLUB (mais il en existe beaucoup d’autres) propose des solutions en ce sens : shampoings solides, gourdes, couvercles organiques, sacs en tissu, adoucisseurs d’eau… 
 

« La pollution au plastique s’observe au microscope »

François Calagni, océanologue à l’Ifremer, a consacré sa carrière aux pollutions marines. Il relativise le drame des marées noires, très spectaculaires mais assez facilement digérées par l’océan. La pollution au plastique, répandue à l’échelle du globe, est beaucoup plus insidieuse. « Environ 5 000 milliards d’objets plastiques flottent sur les océans et on ne sait absolument pas comment les en retirer » dénombre le chercheur. Le navigateur américain Charles Moore, croisant sur sa route des îlots de déchets terrestres, a créé l’expression « 7e continent » pour décrire l’étendue de cette pollution. Une formule-choc, volontairement exagérée et largement reprise par les ONG, qui traduit mal la réalité du phénomène. « Les amas d’objets flottants de grande taille, très spectaculaires, existent bel et bien. Ils sont localisés à la croisée des courants marins, sur des largeurs de l’ordre d’un ou deux kilomètres. On les trouve aussi dans les bras asséchés des grands fleuves comme le Nil, en Egypte » précise François Calgani. « Mais la vraie pollution au plastique s’observe au microscope. On compte environ 250 000 particules de polymères par km2 en presque tous les points de l’océan et jusqu’à un million dans les zones de forte concentration. Les poissons de surface en avalent beaucoup, de même que les tortues. En mer du Nord, on en trouve en moyenne 0,6 g dans chaque oiseau fulmar. Cela semble peu mais c’est comme si l’on retrouvait 60 g de plastique dans un estomac humain ». Filtrant beaucoup d’eau pour se nourrir, les mollusques et les baleines à fanons sont malheureusement les animaux plus touchés.

La preuve par l'image

La calanque des Cambrettes, près de Marseille, juste après un orage : le ruissellement et le débordement des égouts provoquent un afflux spectaculaire de matières plastiques.

Recyclable, mais pas recyclé…

Le plastique n’est pas biodégradable. Sa durée de vie se compte en siècles, au terme d’un lent processus de dégradation. Certaines variétés sont recyclables, mais très peu sont recyclées faute de circuits d’économie circulaire. Pour progresser sur ce plan, il faudrait trier les déchets de façon à bien séparer les différents types de polymères. Pour le moment, les déchets plastiques confiés aux poubelles sont donc le plus souvent enfouis ou incinérés. Certains pays, en Afrique par exemple, sont même rémunérés pour servir de déversoirs aux déchets. Déchargés à proximité des côtes, laissés à tous les vents et à toutes les pluies, beaucoup se retrouvent en mer. La négligence humaine et le défaut d’infrastructures de traitement constituent donc des facteurs importants de pollution marine. Les emballages abandonnés (sacs, pots, bouteilles, tubes…) représentent près de la moitié des déchets retrouvés en mer. De ce point de vue, l’interdiction progressive des plastiques à usage unique au sein de l’Union européenne est assurément une bonne nouvelle pour l’environnement ! Mais cela suffira- t’il ? 

D’autres formes de pollution marine

Il n’y a malheureusement pas que le plastique pour polluer les océans. Les rejets de métaux lourds, issus de l’industrie, sont eux aussi très toxiques. De même que les traitements « anti-fooling » des coques de navire pour favoriser leur glissement sur l’eau. Ils contiennent des substances toxiques qui affectent les populations de coquillages. Les sels, issus de l’agriculture et des rejets d’eaux d’épuration, constituent également un problème en générant la prolifération d’algues et la disparition de l’oxygène marin. Les lotions solaires à base de filtres chimiques devraient également être proscrites : pour se protéger des brûlures du soleil, mieux vaut un tissu ou une crème solaire naturelle et respectueuse des océans ! 

L’avenir du Projet Azur

Remontant la Loire à vélo, Anaëlle pense à son avenir. « Le Projet Azur va se poursuivre, c’est certain. D'autres écoaventurières marchent déjà sur mes traces » se rassure-t -elle. « Pour ce qui me concerne, j’aimerais m’adresser davantage aux enfants. Ils incarnent l’avenir, leur spontanéité et leur enthousiasme me touchent. En comparaison, les adultes semblent cristallisés dans leurs habitudes. Je compte sur les enfants pour convaincre leur famille ! ». 
Cet automne, Anaëlle aura l’occasion de s’adresser à son public préféré : avec la MAIF, elle prépare un cycle de conférences gesticulées qui s’adresseront en priorité au public scolaire. Les premières dates sont connues : à Avignon le 18 novembre et à Caen le 2 décembre. 
La MAIF sera aussi présente à son arrivée au Mont-Gerbier-de-Jonc, le 12 septembre. « Tous les militants MAIF de la région sont conviés ! Nous ferons les derniers kilomètres en sa compagnie, pour un final en apothéose » annonce Bernard Gasparin, militant en Haute-Loire. Ce sera l’occasion de se remémorer les anecdotes du parcours aller, en kayak. Les militants MAIF étaient présents tout au long de ce trajet, apportant à Anaëlle leur connaissance des lieux et leur soutien logistique. Bien pratique pour passer les barrages d’EDF, qui obligent à un détour par la route de dix kilomètres ! Chaque dimanche matin, ces militants participaient avec elle à l’accueil des glaneurs, offrant même parfois la collation aux randonneurs. Uniquement constituées de produits et boissons de terroir sans emballages, bien entendu ! 
 

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